
L’interruption médicale de la grossesse désigne une grossesse dont on a malheureusement choisi d’arrêter le cours pour une raison médicale, qu’elle concerne la mère, le fœtus, ou bien les deux à la fois. Elle peut avoir lieu jusqu’au terme de la grossesse. Différente de l’interruption volontaire de grossesse (IVG), des fausses couches (FC) ou de la mort fœtale in utero (MFIU), elle fait partie de ces tristes scénarios des accouchements du silence, encore très tabous.
Interruption médicale de grossesse (IMG) : dans quels cas ?
Un diagnostic prénatal lors d’une échographie de routine, des examens complémentaires qui annoncent le pire, une urgence maternelle… Il existe des situations où la grossesse peut prendre un tournant dramatique et vous mener à prendre une décision cruciale, avec le soutien d’une équipe médicale spécialisée.
Quelle est la différence entre IVG et IMG ?
L’interruption volontaire de grossesse (IVG) est une décision personnelle qui consiste à mettre fin à une grossesse non désirée. Elle est encadrée par la loi jusqu’à 14 semaines de grossesse (16 semaines d’aménorrhée). L’interruption médicale de grossesse (IMG), quant à elle, n’a pas de limite de délai : elle est décidée pour des raisons médicales, qu’il s’agisse d’une pathologie fœtale grave ou d’un risque vital pour la mère. Les démarches sont donc différentes : l’IVG est un droit, tandis que l’IMG résulte d’une décision médicale.
La détection d’anomalie
La plupart du temps, c’est une anomalie à une échographie de routine (notamment l’échographie du premier trimestre ou celle du deuxième trimestre) qui devient le point de départ d’une inquiétude du corps médical, qui vous orientera alors vers des examens complémentaires pour confirmer ou non ces doutes. C’est une attente anxiogène qui débute, avant les résultats pouvant faire basculer le cours d’une grossesse déjà souvent investie.
Vous serez alors idéalement pris en charge par une équipe spécialisée, dite du « diagnostic anténatal », à laquelle il ne faut surtout pas hésiter à poser des questions, demander à reformuler quand tout n’est pas clair dans ce vocabulaire parfois violent et exprimer ses angoisses pour ajuster le suivi au mieux selon votre situation.
Des examens complémentaires
Les différents examens possibles dans ce contexte vont de la « simple » prise de sang (comme celle prescrite pour le dépistage d’un risque de trisomie 21), à une échographie plus spécifique (du cœur de votre bébé par exemple), une amniocentèse ou encore une IRM et peuvent ajouter du stress.
Lors de l’attente de ces examens décisifs, ou de leurs résultats : il est important de vous faire accompagner sur le plan psychologique si vous en ressentez le besoin. N’hésitez pas non plus à vous confier à des proches de confiance pour obtenir tout le soutien nécessaire durant cette période en suspens. Ce que ces examens multiples cherchent à dépister sont les malformations sévères, les anomalies chromosomiques, une maladie génétique, ou une infection grave dont pourrait souffrir le fœtus que vous portez et qui pourraient conditionner son avenir.
Dans d’autres cas, sans qu’une pathologie fœtale particulière ne soit décelée, la poursuite de la grossesse semble malgré tout très sérieusement compromettre son devenir. C’est ce qu’on constate lors d’un retard de croissance très sévère précoce ou de rupture très prématurée de la poche des eaux, deux situations qui empêchent le bon développement du fœtus et peuvent également compromettre votre santé si la grossesse se poursuivait.
Si vous avez des questions, n’hésitez pas à télécharger l’application May. Vous pourrez accéder à une messagerie avec des sages-femmes qui vous répondent 7j/ 7 de 8h à 22h.
L’urgence maternelle
Dans d’autres cas, bien plus rares, c’est justement la santé de la mère qui impose qu’on interrompe la grossesse malgré un terme très prématuré. On parle d’IMG « pour sauvetage maternel », quand on ne peut se permettre d’attendre un terme de viabilité de l’enfant à naître pour prendre en charge sa mère, avant que sa vie à elle ne soit en jeu.
Il peut s’agir d’une pathologie liée à la grossesse et qui dégénère sans qu’on puisse la stabiliser, comme c’est le cas de pré-éclampsie sévère et précoce par exemple. Il peut aussi s’agir d’une maladie sans rapport avec la grossesse, mais qui se déclare pendant ses premiers mois et impose qu’elle s’arrête pour qu’on puisse traiter la mère correctement (cancers invasifs, détresse psychiatrique majeure, etc.).
L’interruption médicale de grossesse (IMG) se pratique dans le cadre d’une hospitalisation, avec l’objectif d’assurer l’expulsion du fœtus dans les meilleures conditions possibles, en limitant la douleur, les risques physiques et l’impact psychologique pour la mère.
Le déroulement d’une IMG
Dans la majorité des cas, l’IMG repose sur un déclenchement médicamenteux de l’accouchement par voie naturelle, permettant de préserver l’utérus en évitant une intervention chirurgicale. Plusieurs médicaments sont administrés selon des protocoles adaptés au terme de la grossesse, à votre état de santé, à vos antécédents et aux éventuelles contre-indications.
Ces traitements médicamenteux provoquent des contractions, souvent douloureuses, ce qui peut justifier la mise en place d’une anesthésie, le plus souvent avec une péridurale.
Si la méthode médicamenteuse ne suffit pas, l’équipe médicale peut avoir recours à une intervention chirurgicale, telle qu’un curetage par aspiration.
Lorsque la grossesse dépasse 22 à 24 semaines d’aménorrhée, soit le seuil de viabilité, une anesthésie fœticide est généralement réalisée avant le déclenchement de l’accouchement, afin d’éviter toute perception de la douleur par le fœtus ainsi qu’une potentielle naissance vivante. Selon les pratiques, cela consiste le plus souvent à injecter dans le cordon ombilical un produit anesthésiant ou analgésiant, suivi d’une substance entraînant le décès du fœtus.
Enfin, tout au long de la procédure et après l’intervention, des mesures spécifiques sont mises en place pour prévenir les complications, protéger votre santé et préserver vos chances pour une future grossesse.
Interruption médicale de grossesse (IMG) : les étapes de décision
La demande d’IMG nécessite une information claire, un temps de réflexion et un accompagnement attentif afin d’aider la femme enceinte à traverser ce moment difficile.
La demande d’IMG
L’IMG découle toujours d’une demande de la femme enceinte ou du couple, suite à une information communiquée par le corps médical. Ce n’est jamais une obligation : malgré un pronostic fœtal sombre, vous avez tout à fait le droit de choisir de poursuivre la grossesse. Un accompagnement de soins palliatifs à la naissance, adapté à la situation de votre enfant, vous sera alors proposé.
Suite à une demande d’IMG formulée, le dossier doit être discuté au cours d’une réunion d’un CPDPN. Le CPDPN est un Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Pré-Natal qui a vocation à aider les équipes médicales et les couples dans la prise de décision et le suivi de la grossesse lorsqu’une malformation ou une anomalie fœtale est détectée ou suspectée.
En cas de pathologie foetale
En cas de « forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une pathologie d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic » (anomalie chromosomiques comme la trisomie 21, malformations cardiaques sévères, syndromes, etc.) le CPDPN peut délivrer une attestation de gravité permettant de mettre en place le protocole de l’IMG, si cela correspond au souhait des parents.
En cas de pathologie maternelle
Si « la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme » , à la demande de la patiente, une concertation pluridisciplinaire doit réunir au moins 4 personnes dont un gynécologue obstétricien de CPDPN, un médecin spécialiste de la pathologie maternelle, un médecin choisi par la patiente et un assistant social ou psychologue. Cette concertation peut aboutir à une décision d’IMG si deux des médecins délivrent une attestation de gravité.
Le délai de réflexion
En l’absence d’urgence maternelle, il reste important de respecter un délai de réflexion d’au moins une semaine avant de réaliser une IMG. Bien évidemment, ce délai peut être allongé à votre guise et ce jusqu’au terme de la grossesse si c’est le temps qui vous semble nécessaire pour mûrir cette réflexion ou revenir dessus. Cette décision vous appartient. Vous n’avez aucune culpabilité à avoir dans un sens comme dans l’autre et personne n’a le droit de vous juger.
Des questions essentielles
Un accompagnement psychologique vous sera systématiquement proposé en couple et séparément. Si vous en ressentez le besoin, foncez. Les équipes sont formées à ces situations et peuvent devenir de véritables alliés dans ce parcours douloureux. Vous pourrez discuter de beaucoup de sujets sensibles liés à cette décision et réfléchir à toutes ces questions auxquelles il faudra répondre :
- Donner ou non un prénom et un nom à votre bébé.
- Voulez-vous voir votre bébé à la naissance ?
- Souhaitez-vous prendre en charge ses obsèques (déclaration à l’État Civil obligatoire dans ce cas) ou le confier à l’hôpital ?
- Donnez-vous votre accord pour que soit réalisée une autopsie, une radiographie, et/ou des analyses sur le placenta pour obtenir des informations supplémentaires ?
- Souhaitez-vous le déclarer à l’État Civil ?
- Avez-vous besoin de rencontrer un représentant du culte religieux (laïc engagé ? rabbin ? prêtre ? imam…) ?
- Quels sont vos droits sociaux après l’accouchement qui va suivre, selon votre situation ?
Rassurez-vous : vous n’êtes pas obligés de décider de tout ça avant le jour J. Les équipes médicales sauront vous conseiller et surtout suivre votre rythme de parents. Ces décisions importantes peuvent paraître vertigineuses après une telle annonce et mûrir pendant plusieurs jours. Jusqu’à celui de l’accouchement si besoin ! Prenez le temps nécessaire et respectez votre cheminement de parents.
Soyez assurés que les équipes de la maternité sauront vous entourer avec le plus de bienveillance possible et respecteront les choix qui seront les vôtres.
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Crédits photos : puhimec | nd3000 | IrynaKhabliuk